La préparation de Neptune en vue de l’OGR 2023, départ en septembre prochain, bat son plein. Une équipe technique s’active autour du bateau au chantier Infinity, sur la rive droite de la rivière d’Auray en Bretagne. De leurs côtés, les membres du futur équipage mènent leur existence quotidienne, partagés entre vie familiale et professionnelle. Mais dans leurs esprits passent les rêves fous d’une navigation autour du monde qui se profile sur un horizon de plus en plus proche. Dans la mesure de leurs possibilités, chacun donne un peu de son temps, de ses conseils, de ses compétences, pour se préparer à la grande aventure océanique, technique et humaine. Au cœur de cet orchestre, Bertrand Delhom, l’un d’entre eux, joue une partition peu commune. Depuis un peu plus d’un an, il sait qu’il est prisonnier d’une affection neurodégénérative actuellement incurable : celle de Parkinson. Il a décidé de la combattre en course, autour du monde. Après avoir rencontré Tan Raffray, le skipper de Neptune, puis forcé le respect de l’équipage, il est « embarqué ». Encore faut-il pouvoir faire face ! C’est la raison pour laquelle, avec détermination, Bertrand s’astreint quotidiennement à un apprentissage physique et mental hors du commun pour être, dans moins d’un an, à la hauteur de la tâche.
Se soigner par la mer
Bertrand navigue dès l’âge de sept ans et n’a jamais cessé de parcourir la mer à la voile. Cette passion enracinée dans son existence l’a décidé presque naturellement à se « soigner par la mer » après avoir pris conscience de son affection. Depuis une année, il porte une maladie incurable, et c’est dans ce milieu marin qu’il affectionne, où il se sent bien, qu’il a choisi de se battre. Son grand projet salvateur est bien celui d’être à bord de Neptune, entouré par un équipage de marins dans la course autour du monde de 2023. Cet enjeu, il le place très haut, avec le cap Horn en point de mire. Bertrand possède toutes les bases techniques de la navigation. Le but de sa préparation actuelle est simplement de s’entretenir physiquement, de se muscler, comme tout équipier consciencieux à l’aube d’une navigation difficile. Mais il n’oublie pas que son état de santé évolue avec la maladie. Avec l’aide de professionnels de la médecine sportive du club Brest-Iroise, il a établi un programme de travail pour combattre ses difficultés et pouvoir occuper sereinement sa place dans un équipage. Créé en 1976, le club de gymnastique a évolué au fil d’une quarantaine d’années. Il est affilié à la Fédération Française de Gymnastique et travaille aujourd’hui plus particulièrement sur deux disciplines : la gymnastique rythmique avec une finalité de compétition et le trampoline orienté pour le loisir. Pour les marins, le protocole de préparation tourne autour du maniement des « sangles élastiques » pour adapter la posture du corps, les muscles, au travail sur les winches (treuils pour border écoutes et drisses). En parallèle de son travail au sol, Bertrand ne reste pas inactif. Il joue un rôle important dans l’association Handivoile-Brest en encadrant la formation des élèves. Le but de cette association est d’enseigner, avec les personnes valides et celles atteintes d’un handicap physique ou sensoriel, la pratique en commun des activités nautiques de loisir ou de compétition. Le sport de la planche à voile, la nage avec palmes et la pratique régulière du vélo complètent l’entraînement personnel de Bertrand.
Pour la seconde Whitbread, celle de 1977, Neptune avait été conçu selon les aménagements de l’époque ou primait l’efficacité et la simplicité. Son plan de pont et ses aménagements intérieurs vont être adaptés à un mode de vie et à une sécurité qui tiennent compte des aptitudes de tous. À plus long terme, le bateau, après la course, sera en mesure de répondre à un programme de navigations pour personnes en situation de handicap. Le Centre Mutualiste de Kerpape situé à Ploemeur près de Lorient réfléchit, avec l’équipage, aux modifications à apporter. Il travaille sur l’ergonomie et la sécurité du bord. Il s’agit d’un établissement de soins spécialisé dans la rééducation et la réadaptation fonctionnelles traitant également de la médecine physique. Dans la cadre de la préparation technique du bateau, l’expérience d’un centre aussi spécialisé sera précieuse.